Ils s’appellent Matthieu, Arnault, Laëtitia ou Jean-Michel.

Ils ont en commun de vivre avec une maladie : l’hémophilie. 

Dans la première saison de Singularité, ils acceptaient de nous parler d’eux, de leurs secrets et de leur quotidien, pas si différent du nôtre. 

Dans cette nouvelle saison, partez à la rencontre de Patrice, Barnabé et Nathalie. Des amis, des amants, passionnés de voyages, de sports ou encore de nature, atteints d’hémophilie ou parents de personnes qui en sont atteintes. Faites également la connaissance d’Annie, Steffi, Marion et Laurent, les professionnels de santé qui les guident et les accompagnent au quotidien.

Pour ces cinquièmes et sixièmes épisodes, nous quittons la France direction la Guinée Conakry. L’enjeu ? Comprendre comment les programmes d’aides humanitaires permettent aux patients des pays émergents d’accéder aux soins.  

Effectivement, on estime qu’à travers le monde 3 personnes vivant avec l’hémophilie sur 4 n’ont pas accès à des traitements, ou alors partiellement 1.

Alors, comment rendre ces traitements accessibles ? Comment sensibiliser et diagnostiquer les personnes atteintes d’hémophilie dans ces pays émergents ? Laurent, hématologue militant en faveur d’un meilleur accès aux soins, notamment en Afrique, nous raconte la mission à laquelle il a participé en Guinée Conakry. De son côté, Nathalie, maman de deux garçons atteints d’hémophilie suivis par le docteur Frenzel, nous partage son retour d’expérience suite à sa première mission dans l’équipe du médecin de ses fils.

Bonne écoute !

Laurent – Le médecin sans frontière 

“Ce dépistage, il est vraiment important pour repérer, diagnostiquer et, bien sûr, suivre et traiter les patients dans ces pays émergents. »

Il y a quelques mois, le docteur Frenzel – hématologue depuis plus de 10 ans et responsable d’un centre de traitement de l’hémophilie en France – s’est rendu avec une équipe complète de médecins, biologistes, kinésithérapeutes, patients et familles ressource en Guinée Conakry. Ce voyage, organisé dans le cadre d’un jumelage entre la France et l’Afrique, visait à améliorer le diagnostic, la prise en charge et l’accès aux soins des personnes atteintes d’un trouble héréditaire de la coagulation dans un certain nombre de pays émergents.

C’est alors qu’il se prépare pour son second départ, toujours en Guinée Conakry, que nous retrouvons le docteur Frenzel. L’occasion de revenir plus longuement sur la première mission à laquelle il a participé.

Guinée Conakry - Roche Singularité

À son arrivée, il se confronte au manque de moyens de l’hôpital universitaire bien différent de ceux qu’il a connus en France. Il y fait la connaissance du chef de service d’hématologie et de son équipe qui font leur maximum, jour après jour pour aider les patients qui ne sont, pour la plupart, pas en mesure de régler leurs frais hospitaliers. C’est d’ailleurs une des raisons pour lesquelles le chef de service guinéen, qui s’était formé en France durant quelques mois, tente de récolter des fonds auprès d’associations. Son ambition : permettre à ses patients d’accéder à une partie des traitements européens. 

Au-delà des frais engendrés par le dépistage en lui-même, une grande partie de la population réside dans des campagnes situées parfois à plus d’un jour de trajet de la ville, complexifiant encore davantage la prise en charge. Ainsi, dans les pays d’Afrique, le nombre de personnes dépistées est largement inférieur à celui des autres pays du monde. Par ailleurs, les personnes atteintes d’hémophilie présentent généralement une dégradation très avancée de leur état de santé articulaire,et ce, dès leur plus jeune âge. 

La priorité de la mission a donc été d’améliorer le dépistage afin de pouvoir les diagnostiquer, les suivre et les traiter dans un second temps. Pour ce faire, plusieurs actions ont pu être menées sur place .Le docteur Frenzel a notamment pu passer dans une émission de télévision locale largement regardée pour présenter le programme de sa mission. Il a également apporté sur place des outils permettant, entre autres, de rechercher des problèmes d’hémostase et c’est la biologiste de son équipe qui a été amenée à former, pendant toute une semaine, les biologistes sur place à leurs utilisations.

“La majorité des patients hémophiles en Afrique n’a pas eu de traitement. Et donc l’accès à ces thérapeutiques est indispensable. »

Dans des pays comme la France, les patients atteints d’hémophilie nécessitent 2 à 3 injections par semaine. En Guinée Conakry, l’accès à ces traitements pour les personnes atteintes est exceptionnel voire inexistant. 

La première mission à laquelle le docteur Frenzel et son équipe ont pu participer leur a permis d’identifier le nombre de patients atteints afin de déterminer la quantité de traitements nécessaires. Grâce à ces résultats, l’hématologue français a pu demander à l’Association mondiale des patients hémophiles d’envoyer les traitements sur place.
Maintenant que les traitements sont arrivés en Guinée Conakry, la seconde mission aura pour objectif de former les familles et les patients à s’administrer le traitement avec l’aide de l’infirmière du centre hospitalier français. La kinésithérapeute de l’équipe leur apprendra, quant à elle, des exercices de renforcement musculaire pour améliorer leur mobilité et réduire ainsi leur souffrance.

Dessin de personnes distribuant du materiel médical | Roche singularité

Pour mener à bien l’intégralité de son programme en Guinée Conakry et améliorer durablement la qualité de vie des patients sur place, le docteur Frenzel a l’ambition d’y effectuer au moins deux visites par an pendant les 4 à 5 prochaines années. Une belle aventure humanitaire qui n’a pas fini de s’écrire et devrait permettre aux Guinéens atteints d’hémophilie d’entrevoir un plus bel avenir.

Nathalie – La maman au grand cœur  

« C’est dommage finalement d’avoir la solution thérapeutique et qu’une partie de la population et des malades en soit coupée. »

Nathalie est maman de deux garçons atteints d’hémophilie A sévère, tous deux suivis par le docteur Frenzel. Lorsque ses enfants ont quitté le cocon familial pour prendre leur indépendance, elle a pris conscience que son expérience de la maladie pouvait venir en aide à des familles qui y sont également confrontées, et qu’elle pouvait, par conséquent, leur consacrer un peu de son temps. Alors lorsque  l’hématologue de ses fils lui propose de rejoindre son équipe pour partir en mission humanitaire en Guinée Conakry, c’est tout naturellement qu’elle accepte sa proposition. 

Elle nous partage dans ce sixième épisode son expérience riche en souvenirs et en émotions.

Portrait de Nathalie avec ses deux enfants | Roche, Singularité

Les moments de doute sur le fait d’être à la hauteur et de réussir sa mission se sont vite dissipés lorsque Nathalie rencontre enfin les familles venues chercher des réponses et de l’aide. Le premier contact a lieu à la faculté de médecine de Conakry dans le cadre de la semaine de l’hémophilie. Beaucoup de personnes ont effectué le déplacement avec leurs enfants mais aussi leurs nourrissons. Grâce au matériel de dessin apporté par l’équipe française pour les enfants, les discussions et les relations se nouent rapidement.

Durant la semaine, les journées commencent tôt et se terminent souvent tard : consultations, prélèvements sanguins et diagnostics sont réalisés et des ateliers d’éducation thérapeutique sont mis en place. Ces ateliers ont permis aux familles guinéennes d’appréhender la maladie et leur ont également permis de partager les connaissances qu’elles ont pu acquérir avec d’autres familles n’ayant, malheureusement, pas pu effectuer le déplacement. 

Les connaissances des familles sur la maladie se révèlent être relativement hétéroclites. Certaines savent que l’hémophilie est une maladie héréditaire alors qu’a contrario, certaines familles pensent avoir affaire à une malédiction ou à la sorcellerie. D’autres n’avaient tout simplement jamais entendu parler de l’existence de l’hémophilie.

C’est dans ce contexte où il y a tant de choses à mettre en place et tant de personnes à aider, que les connaissances scientifiques des professionnels de santé, couplées aux témoignages et à l’expérience des familles ressources, ont démontré tout leur intérêt et leur complémentarité.  

Effectivement, qui de mieux placé qu’un hématologue pour expliquer la maladie ? Qui de mieux placé qu’un parent de patient pour partager son expérience et soutenir un autre parent ? 

Dessin d'une personne réconfortant une seconde personne | Roche, singularité

Comme tous les membres de l’équipe, Nathalie a tenu un rôle prépondérant dans cette mission. Elle a notamment été amenée à écouter et rassurer des familles lorsqu’elles étaient dans l’attente des résultats de prélèvement sanguin de dépistage de leurs enfants. Elle a pu apporter son soutien aux parents d’un enfant hémophile angoissés à l’idée que leur petit dernier puisse également être touché par la maladie. Lorsque la biologiste effectuait les prélèvements, elle a su réconforter les familles en leur expliquant que les traitements existent et qu’ils seront bientôt disponibles à Conakry. La mère de famille a également su trouver les mots justes  lorsqu’elle leur a expliqué que si ses enfants ont pu grandir avec la maladie et vivre une vie presque normale, les leurs le pourront aussi.  Nathalie a également pu sensibiliser les familles à l’importance de préserver les articulations des patients hémophiles dans l’attente de voir les traitements arriver, et a pu leur expliquer différentes étapes auxquelles elles seront confrontées afin de pouvoir y faire face plus sereinement. 

Elle se souvient avec une grande émotion de son départ de Conakry avec l’ensemble de  l’équipe, lorsque toutes les familles étaient venues leur dire au revoir avec la promesse de se revoir vite. 

Grâce à cette mission humanitaire en Guinée Conakry, Nathalie est devenue la “sœur de sang” de toutes ces familles de cœur qu’elle a pu rencontrer. Elle reçoit encore régulièrement de leurs nouvelles et des photos des moments importants de leurs vies. Une aventure humaine forte qu’elle devrait, demain, partager avec ses deux grands enfants. Ses deux fils souhaitent rejoindre l’aventure lors de prochaines missions, cette fois-ci en dehors de la capitale guinéenne, là où encore beaucoup d’autres familles doivent y être rencontrées pour mener à bien d’autres campagnes de sensibilisation et de dépistage.  


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