Clara est diagnostiquée tardivement d’une hémophilie B mineure. Après une adolescence très difficile entre l’appropriation de son propre corps, la connaissance de sa maladie et le regard des autres, Clara se forge un caractère qui lui donne la volonté de faire changer les choses. Aujourd’hui, Clara s’est engagée dans la commission Femmes de l’Association des Hémophiles de France (AFH).

Un diagnostic tardif

Le père de Clara a passé plus de 30 ans de sa vie sans savoir qu’il était hémophile. C’est à la suite d’une banale prise de sang précédant une opération qu’il découvre sa maladie. Suite à cela, tout son entourage se fait tester, révélant une maladie jusqu’alors inconnue dans la famille. Sa grand-mère est conductrice, son père et son oncle sont atteints. Clara apprend à l’âge de 8 ans qu’elle est hémophile B mineure, alors que son frère, lui, passe au travers. 

L’hémophilie B étant une maladie essentiellement catégorisée masculine, l’identité de la petite Clara sera légèrement perturbée. Longtemps, elle se demande si elle est née fille ou garçon. Par la suite, elle comprend que les filles hémophiles existent bel et bien, mais que cela est rare et que l’on en parle pas

Les règles : un calvaire pour les femmes hémophiles

C’est à l’adolescence que sa vie se complique davantage. Seule femme de son entourage a avoir cette maladie, Clara peine à trouver des informations sur sa maladie. L’arrivée des règles est chez elle un véritable enfer : avec son flux sanguin important, elle doit doubler les protections hygiéniques et les changer toutes les 2 heures. Au collège, comme elle ne maîtrise pas encore bien ces périodes complexes, il lui arrive d’avoir des accidents et d’avoir son jean imprégné de sang après un cours. 

Très jeune, son médecin lui suggère de prendre la pilule afin de limiter ses règles. Puis on lui propose un implant contraceptif, qui lui déclenche des règles tous les jours. Sportive, Clara fait beaucoup de handball et ses règles abondantes lui provoquent des anémies et créent une fatigue supplémentaire. Son parcours contraceptif continue avec une pilule particulière sur laquelle elle n’a pas d’information. Un oubli un soir et Clara tombe enceinte, à 19 ans. Elle décide donc de se faire avorter. Du fait de son statut d’hémophilie, elle bénéficie d’une prise en charge très stricte. C’est à ce moment qu’elle réalise à quel point son cas est rare et que peu de médecins connaissent vraiment l’hémophilie chez les femmes.

Je suis inquiète, parce que je n’ai pas envie qu’une jeune femme ou une ado vive la même chose que ce que j’ai vécu.

Méconnaissance des médecins

Son petit ami de l’époque, étudiant en médecine, lui rapporte que les docteurs de référence n’évoquent jamais les femmes lorsqu’ils parlent d’hémophilie. Certains d’entre eux affirment même que ça n’existe pas. Elle en prend conscience lorsqu’elle arrive aux urgences en annonçant sa maladie : on ne la croit pas, on lui demande de montrer sa carte d’hémophile. Affichant des informations le prouvant, Clara se sert aujourd’hui beaucoup de cette carte.

Lorsqu’elle en parle aux médecins, nombreux sont ceux qui lui répondent qu’elle n’est que conductrice, qu’il n’y a pas de troubles hémorragiques, qu’elle n’est pas vraiment hémophile.

Il y a et il y aura des femmes hémophiles dans mon cas. Elles n’ont pas à vivre ce que moi j’ai vécu.

S’investir pour informer

Clara s’investit auprès de l’Association des Hémophiles de France, commission Femmes. Créée à l’origine pour soutenir psychologiquement les mères conductrices, cette commission s’ouvre petit à petit à des femmes atteintes d’hémophilie. C’est pour elle l’occasion de porter la voix des femmes au sein des hémophiles mais aussi d’autres maladies hémorragiques rares (Willebrand par exemple). 

La passion du sport  dans le sang

Le père de Clara, hémophile sans le savoir, était un joueur de rugby à un niveau professionnel. C’est lui qui lui donnera le goût du sport. Clara commence le sport très jeune, et pratique notamment le handball de manière intensive. Cependant, un traumatisme crânien alors qu’elle s’apprête à marquer un but met un terme à ses 14 ans de carrière. À 18 ans, tous ses rêves de (petit) ballon rond s’envolent.

Passionnée de sport, Clara se lance dans une nouvelle aventure : la voile en compétition. Ce qui avait toujours été pour elle un loisir devient un véritable sport. Elle fait sa première traversée transatlantique avec un ami, pour ramener un bateau de la route du Rhum depuis la Guadeloupe (lieu d’arrivée de la course). Mais la course s’arrête aux Açores lorsqu’une coupure s’infecte ; elle doit être rapatriée. Cette coupure n’est en rien un frein, et Clara compte bien remettre les voiles. 

Lors de sa préparation pour sa deuxième transat, Clara rencontre Martin. Les deux jeunes ont le même projet. Après un rapprochement, ils décident de faire la traversée Jacques Vabre de 2021 ensemble. Cette fois-ci, aux couleurs de l’hémophilie avec l’Association des Hémophiles de France… Mais pas uniquement ! D’ailleurs, si vous souhaitez la soutenir dans son projet, Clara cherche justement des sponsors.